Interactions virus/vecteurs

DENWOLution : Dengue et Wolbachia, impacts sur l’évolution génétique virale et le profil épidémiologique

Porteur de projet : M. Dupont-Rouzeyrol

Collaborateurs IPNC : O. O’Connor, C. Tanvet, JP Martinet, N. Ochida, C. Inizan

Dates : Janvier 2020 – Décembre 2024

Partenaires : IRD, Institut Pasteur Paris, Monash University, WMP Nouvelle-Calédonie, CHT, DASS-NC, IPNC

Le résumé 

La circulation et l’évolution du virus de la dengue (DENV) sont caractérisées par une diversité génétique importante. Cependant, les facteurs conditionnant l’évolution du DENV sont encore mal compris. Dans le cadre du World Mosquito Program, la stratégie Wolbachia est déployée en Nouvelle-Calédonie (NC), et devrait conduire à une réduction substantielle de la circulation de la dengue en NC. Cependant, bien que les résultats soient prometteurs, cette méthode pourrait avoir des limites dans le futur. Le DENV possédant une grande plasticité génétique lui conférant une capacité d’adaptation à différents environnements, les questions suivantes sont soulevées : i) Quel est l’impact de Wolbachia sur l’évolution génétique du DENV ? et ii) Cette évolution peut-elle influencer l’efficacité de la stratégie ? Par une caractérisation spatio-temporelle étendue de l’évolution du DENV, l’analyse du génome complet de plus de 250 prélèvements, la combinaison d’études in vitro et in vivo (études de compétence vectorielle), et la modélisation (profil épidémiologique, vecteurs, stratégie Wolbachia, évolution virale), cette étude améliorera notre compréhension de l’évolution du DENV. Il est crucial d’anticiper les conséquences des interactions entre l’évolution du DENV et l’intervention Wolbachia afin d’informer non seulement les applications mais aussi les limites de la stratégie Wolbachia.

Les avancées : volet éthique

Les protocoles de recherche pour le projet DENWolution ont été validés par le Comité de Protection des Personnes et par le Comité Consultatif d’Ethique de Nouvelle-Calédonie en 2020. À la suite de cette validation, le recrutement des patients et l’analyse des prélèvements positifs pour le DENV a pu débuter.

Dans le cadre du volet éthique DENWOLution, l’IPNC peut être amené à utiliser des prélèvements de sérums positifs en dengue conservés dans ses bio-banques. Si vous avez eu un diagnostic de dengue à l’IPNC entre 1995 et 2016 et que vous vous opposez à cette utilisation secondaire, veuillez nous contacter par téléphone au 27.26.66

Les avancées : volet laboratoire

Après plusieurs mois de mise en place et validation du design expérimental permettant la sélection de variants de dengue capables de se répliquer chez le vecteur Aedes aegypti en présence de Wolbachia, les premières expériences in vivo ont été lancées au cours du second semestre 2021. Ainsi, des isolats du DENV (sérotypes 1 et 2) ont été sélectionnés et investigués. Des premiers résultats ont donc été obtenus en 2022. Les analyses étant toujours en cours, nous espérons voir les derniers résultats pour 2024.

En parallèle, la mise en place des techniques de séquençage « Short Read » et « Long Read » sur le MinION (Oxford Nanopore Technologies) ont été initiés pour le séquençage des génomes complets du DENV. La technique « Short Read » a été finalisée et a permis le séquençage du génome du DENV sous forme de plusieurs amplicons d’environ 1kb. Pour le « Long Read », les étapes d’amplification du génome complet du DENV par PCR ont été un succès pour le sérotype DENV-2 et demandent encore quelques validations pour les 3 autres sérotypes. Le séquençage du génome complet de l’échantillon de DENV-2 amplifié (amplicons d’environ 10kb) a donc pu être réalisé. Le traitement bio-informatique de ce séquençage est en cours afin de déterminer si la technique mise en place nous permet bien de répondre aux questions soulevées dans le projet DENWOLution.

Les avancées : volet environnement

En raison de la crise sanitaire COVID-19 et du sas-sanitaire en Nouvelle-Calédonie, puis de l’absence d’épidémie en 2022-2023-2024, ce volet n’a pas pu être déployé. Toutefois, quelques cas sporadiques de dengue ont été reportés, ce qui a permis à nos partenaires de collecter des moustiques autour de ceux-ci. Les premiers moustiques positifs pour le DENV ont été détectés en 2021, puis en 2023.

Les avancées : volet modélisation

En collaboration avec l’IRD, un modèle spatio-temporel de dynamique vectorielle basé sur Aedes aegypti a été développé à l’échelle de Nouméa afin de modéliser la stratégie mise en œuvre.

Ainsi, notre étude introduit un modèle de population dynamique pour simuler les lâchers de moustiques Ae. aegypti infectés par Wolbachia sur le terrain, en tenant compte de l’influence du climat sur les caractéristiques des moustiques. Nous avons appliqué ce modèle à Nouméa pour déterminer le nombre optimal de moustiques infectés par Wolbachia à lâcher pour un établissement stable dans chaque quartier, identifier les meilleurs moments au cours de l’année pour les lâchers, et évaluer la réduction subséquente de transmission du DENV après les lâchers. Cette approche innovante, qui s’appuie sur des données météorologiques, pourrait apporter des informations précieuses à d’autres villes qui envisagent d’adopter la stratégie Wolbachia.

Les stagiaires impliqués dans DENWOL

De nombreux stagiaires ont été accueillis dans le cadre de ce projet :

  • 2020 : Louis, stage 2ème année Ass-ingénieur : mise au point des PCR pour le volet laboratoire et environnement
  • 2020 : Marie et Pauline, stage 5ème année Pharmacie : mise en place des schémas d’inclusions VIRIMA pour le volet environnement
  • 2020 : Anais, stage 3ème année Licence : mise en place des méthodes de screening des moustiques collectés pour le volet environnement
  • 2021 : Méryl, stage 2ème année Master : mise au point des tests in vivo pour le volet laboratoire
  • 2022 : Vincent, stage 3ème année Licence : évaluation de la réplication du DENV pour le volet laboratoire
  • 2023 : Clarisse, stage 2ème année Master : analyse d’une expérience de compétence vectorielle pour le volet labo

Les travaux du projet ont également été présentés à des congrès internationaux tels que l’International Congress in Tropical Medicine and Malaria en 2022.

Les publications de DENWOL

Une première publication issue du volet modélisation a vu le jour en 2022 :

https://ehjournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12940-022-00829-z

D’autres publications sont à venir.

Financement : Agence Nationale de la Recherche, Pasteur Network Calmette et Yersin, Fondation Pierre Ledoux Jeunesse Internationale


MINT : Interactions multi-organismes dans le cadre de la stratégie de lutte contre la dengue basée sur Wolbachia

Porteur de projet : Myrielle Dupont-Rouzeyrol

Collaborateurs IPNC : Olivia O’Connor, Anne-Fleur Griffon, Karl Huet, Kenny Teraiharoa, Nicolas Pocquet

Stagiaires : Dominique Valtain

Partenaires : UNC, IP, Monash Univ, IPNC

Dates : Avril 2024 – Mars 2029

MINT est un projet de recherche mené par l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie. Ce projet vise à étudier les interactions globales entre Wolbachia et le microbiote des moustiques, et leurs effets sur la capacité du moustique à transmettre le virus de la dengue.

En Nouvelle-Calédonie, des moustiques Aedes aegypti infectés par Wolbachia, une bactérie endosymbiotique héréditaire qui rend son hôte résistant aux virus, ont été relâchés dans le cadre d’une stratégie de lutte biologique pour prévenir les épidémies dues au virus de la dengue. Cependant, nous savons que i) Wolbachia perturbe l’écosystème des microorganismes (microbiote) du moustique, et que ii) le microbiote du moustique influence la capacité des moustiques à transmettre des virus pathogènes humains.

Dans le cadre du projet MINT, nous étudierons dans un premier temps les interactions entre Wolbachia et le microbiote du moustique et dans un second temps leurs effets sur la capacité du moustique à transmettre le virus de la dengue.

Pour mettre en œuvre ce projet nous allons collecter des moustiques Aedes aegypti porteurs ou non de la bactérie Wolbachia. Nous allons ensuite séquencer (métagénomique) le microbiote des moustiques pour voir si la présence de Wolbachia modifie la composition du microbiote du moustique. Les virus et les bactéries du microbiote seront isolés. Nous étudierons ensuite la capacité de ces bactéries et virus isolés à influencer la capacité des moustiques Ae. aegypti infectés ou non par Wolbachia à transmettre le virus de la dengue.

MINT combine des expertises en virologie, bactériologie, bio-informatique et biologie des vecteurs pour répondre à une question de recherche fondamentale dans le contexte environnemental et éco-épidémiologique très pertinent de la Nouvelle-Calédonie. Les résultats générés par MINT apporteront des connaissances primordiales à l’identification des facteurs de risque environnementaux qui pourraient compromettre l’efficacité de la stratégie de lutte contre la dengue basée sur Wolbachia.

Financement : ANR

Crédit photo terrain IPNC, labo UNC


RIVER : Evaluation du risque de transmission vectorielle du virus Ross River en Nouvelle-Calédonie et au Vanuatu en prenant la compétence vectorielle comme proxy

Porteur de projet : Olivia O’Connor

Collaborateurs IPNC : Nicolas Pocquet, Myrielle Dupont-Rouzeyrol

Partenaires : IPNC, DASS-NC, QUT, QIMR Berghofer, Vanuatu MoH

Dates : Mars 2025 – Février 2027

Le virus Ross River (RRV) est un arbovirus qui déclenche des maladies chez l’homme et d’autres animaux, avec l’existence possible d’hôtes réservoirs (tels que les marsupiaux). Bien qu’il soit principalement confiné à l’Australie avec environ 5 000 cas notifiés chaque année, une épidémie majeure de RRV s’est produite dans les années 1980 dans la région Pacifique, y compris en Nouvelle-Calédonie. Depuis lors, quelques cas en dehors de l’Australie ont été signalés par des voyageurs revenant de Fidji. Des études de séroprévalence menées en Nouvelle-Calédonie et dans d’autres PICT suggèrent toutefois la possibilité d’une circulation silencieuse du RRV dans la région du Pacifique Sud. Au vu de ces résultats, il convient d’accorder de l’attention à ce « virus négligé » qui pourrait constituer une menace future pour la Nouvelle-Calédonie, le Vanuatu, et le Pacifique. En raison de leur proximité avec l’Australie et de la complexité des interactions virus-vecteur, nous souhaitons améliorer la préparation au risque d’émergence du RRV en Nouvelle-Calédonie et au Vanuatu en identifiant les espèces de moustiques qui peuvent contribuer à sa transmission et à sa propagation locale. Ainsi, nous visons à répondre aux questions suivantes :

  • – Quelles espèces de vecteurs pourraient assurer la transmission locale du RRV ?
  • – Quel est le niveau de compétence vectorielle des vecteurs locaux pour cet alphavirus ? Sont-ils très efficaces pour transmettre le RRV ?
  • – Si Ae. aegypti peut transmettre le RRV, la souche Wolbachia wMel réduit-elle la transmission du RRV chez Ae. aegypti ?

Les résultats permettront d’adapter les méthodes de lutte antivectorielle en fonction des espèces incriminées, afin d’assurer une réponse rapide à l’émergence du RRV le cas échéant. Enfin, en fonction des résultats, une réflexion sur la pertinence de la surveillance de vecteurs spécifiques et de cas humains par rapport au risque RRV pourrait être engagée avec les autorités sanitaires locales. A terme, les résultats obtenus ici pourraient guider les actions dans d’autres pays ou territoires de la région Pacifique où le RRV a circulé silencieusement.

Financement : Fonds Pacifique


CLIMATIC : Changement climatique et risque de transmission des maladies vectorielles dans le Pacifique

Chef de projet : F. Frentiu (QUT)

Porteur de projet IPNC : M. Dupont-Rouzeyrol

Collaborateurs IPNC : M. Delrieu, O. O’Connor, K. Teraiharoa, N. Pocquet

Stagiaires: M. Hue, M. Aznar

Partenaires : UNC, IRD, Red Blood Cross, QUT

Dates : Juillet 2021 – Juillet 2025

L’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie et la Queensland University of Technology mènent une étude sur l’impact de l’augmentation des températures sur la transmission du virus de la dengue (DENV) par le vecteur Aedes aegypti et l’évolution génétique du DENV.

La Nouvelle-Calédonie, comme les autres îles du Pacifique, est particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique (érosion, feux, accès à la ressource en eau, précipitations, inondations etc). Le changement climatique devrait en particulier avoir à l’avenir un impact significatif sur la santé humaine, via l’augmentation des températures et la modification des régimes de précipitations. Les objectifs du projet CLIMATIC sont d’évaluer l’influence des niveaux de température de l’environnement projetés sous le scénario de changement climatique de Nouvelle-Calédonie sur la capacité des moustiques à transmettre le DENV mais également d’évaluer les impacts sur la diversité génétique du DENV chez les moustiques et la probabilité d’émergence de nouveaux variants viraux.

Un premier travail de recherche bibliographique a été réalisé. Dans l’ensemble, les études incluses suggèrent que l’augmentation des températures due au changement climatique modifierait la compétence vectorielle des moustiques et augmenterait le risque d’épidémie, cependant il reste des lacunes importantes sur ce sujet.

Suite à ce travail bibliographique, le design expérimental du projet CLIMATIC a été élaboré et validé. Les expérimentations actuellement en cours sont menées sous 7 régimes de températures constantes et fluctuantes définis selon les températures estimées dans 20, 50 et 100 ans. 

Financement : Fonds Pacifique, New Colombo Plan, Prix D’Encouragement à la Recherche de la Province Sud



AMAZED : Emergence des maladies arbovirales en Amazonie et dans différents contextes à risque

Porteur de projet : Jean-Bernard Duchemin (Institut Pasteur Guyane)

Porteur de projet pour l’IPNC : Nicolas Pocquet

Collaborateurs IPNC : Myrielle Dupont-Rouzeyrol, Olivia O’Connor, Morgane Pol

Partenaires : Institut Pasteur Guyane, Institut Pasteur Guadeloupe, Institut Pasteur Nouvelle-Calédonie, Institut Pasteur Paris, IRD, EHESP, ANSES, CNRS/ECOFOG

Dates : Septembre 2024 – Août 2027

AMAZED est un projet multidisciplinaire et multicentrique qui vise à étudier les mécanismes d’émergences de pathogènes à vecteurs sous un éclairage « One Health ». Nous profitons de la situation de la Guyane, territoire français ultra-marin tropical et haut lieu de la diversité biologique, pour y tester l’impact, sur l’émergence des arbovirus, des changements d’origine anthropique, en incluant le réchauffement climatique mais aussi l’empiètement humain dans les espaces dits naturels (forêts, savanes) par l’exploitation des ressources en bois, l’orpaillage et le développement des surfaces agricoles. D’autres sites dans les régions Caraïbes, du Pacifique Sud et de l’Europe continentale offriront, par leurs contextes différents à la fois tropicaux ou tempérés, des opportunités de tester les hypothèses de risques associés à des facteurs entomologiques ou humains. Pour remplir ces objectifs, AMAZED étudiera les perturbations des écosystèmes en tant que facteur principal d’émergence des arbovirus et réalisera une évaluation multicentrique des risques entomologiques de diffusion des arbovirus émergents, ainsi qu’une analyse multi-échelles des risques, avec l’introduction des sciences humaines et sociales pour étudier la part liée au comportement humain potentiellement impliquée dans les évènements d’export hors des cycles selvatiques puis de diffusion des arbovirus émergents. Réalisé dans trois territoires français ultra-marins, ainsi que dans l’hexagone, AMAZED pourra ainsi étudier des conditions variées et contrastées de transmission vectorielle et offrir un panorama étendu d’émergences potentielles d’arbovirus.

Financement : PEPR-PREZODE