Cette étude visait à identifier des variants génétiques impliqués dans le développement de la goutte en Nouvelle-Calédonie en collaboration avec l’Université de Strasbourg. En effet, la Nouvelle-Calédonie est aussi impactée par des maladies non transmissibles (MNT) en lien avec des facteurs métaboliques telles que l’obésité, le diabète et la goutte. Cette dernière est une atteinte inflammatoire articulaire à forte prévalence sur le territoire avec des formes précoces et sévères décrites cliniquement.
Une étude menée en 2014 montre qu’en Nouvelle-Calédonie, la goutte touche 3,3% des 18-60 ans et 29% des admissions aux urgences pour une polyarthralgie aigue concernent des patients goutteux (Bardin et al., 2022, Joint Bone Spine, 89(2) :105286). Du fait du caractère très inhabituel des gouttes juvéniles et féminines notamment dans plusieurs familles de Lifou, une première enquête génétique a précédemment été menée utilisant une approche de séquençage d’exomes et les résultats ont montré qu’un variant très rare du gène de la Lactate Déshydrogénase-D (LDH-D) est probablement en cause (Bardin et al., 2022, Ann. Rheum. Dis., 81(suppl.1):911). Le BIONA a par la suite participé à l’étude immunogénétique G-NOMIC de la goutte porté par l’Université de Strasbourg, qui a cherché à identifier de nouveaux variants génétiques impliqués dans cette maladie par une approche de séquençage d’exomes dans des cas familiaux. Les résultats de l’étude ont récemment été publiés dans le journal Rheumatology and Autoimmunity (sous presse). Les membres malades de la goutte et des membres sains au sein des mêmes familles ont été sélectionnés à Lifou. Les ADN génomiques issus de 2 familles sélectionnées ont été analysés par séquençage de l’exome total (WES) ou du panel de gènes spécifiques de la goutte. Les résultats, bien qu’ils ne permettent pas l’identification formelle des variantes responsables de la pathogenèse héréditaire de la goutte, ont conduit à la production d’une liste de 35 gènes potentiellement impliqués dans le déclenchement et/ou le développement de la maladie. De façon intéressante, aucun lien évident de ces gènes avec une maladie inflammatoire ou une hyperuricémie n’a été établi jusqu’à présent. Parmi ceux-ci, NEIL2, codant pour une ADN glycosylase impliquée dans la réparation de l’ADN et dont la délétion améliore l’inflammation induite par le LPS, et TNFRSF1A, qui code pour un membre de la superfamille des récepteurs de TNF, apparaissent comme des candidats plausibles méritant d’autres explorations via des essais de transfection cellulaire et des modèles animaux. A termes, la stratégie de séquençage WES pourrait permettre de découvrir des variants dont l’identification favoriserait une meilleure prise en charge des individus à risque de développer la goutte, et pour lesquels les thérapies d’abaissement d’acide urique, impliqué dans le développement de cette pathologie, devraient être initiées avant tout déclenchement ou une détérioration de la santé induite par des épisodes répétés de crises de goutte.
