L’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie a le plaisir d’annoncer la finalisation de l’étude LEPJAR-NC, menée en collaboration avec le CHT, les CHN de Koné, Koumac et Poindimié, ainsi que l’Institut Pasteur à Paris. Portée par l’unité de recherche sur la leptospirose et le groupe d’épidémiologie médicale de l‘IPNC, cette étude réalisée entre 2021 et 2024 visait à mieux comprendre la réaction de Jarisch-Herxheimer (JHR), une réaction inflammatoire parfois observée au début du traitement antibiotique de la leptospirose. Les résultats, désormais publiés dans la revue PLoS Neglected Tropical Diseases, apportent un nouvel éclairage sur la réponse immunitaire au cours de la leptospirose et sur les mécanismes associés à la JHR.
Nous remercions chaleureusement toutes les personnes ayant accepté de participer à cette étude, ainsi que les équipes hospitalières partenaires, pour leur engagement. Les participants peuvent contacter l’équipe de l’IPNC pour toute information complémentaire sur l’étude ou sur l’utilisation future des données collectées, conformément à la réglementation en vigueur : ipnc-etudeclinique@pasteur.fr ☎️ (+687) 27.02.85
Le mois d’avril, a été marqué par plusieurs activités menées dans le cadre de projets de recherche sur la leptospirose.
Mission à La Foa
Une première mission a été réalisée par Adriana LUGA dans le cadre de sa thèse : « Projet Leptomic ». Elle a consisté en un prélèvement d’échantillons de sol sur une parcelle spécifiquement sélectionnée à La Foa, site faisant l’objet d’un suivi depuis plusieurs mois en raison de ses caractéristiques environnementales jugées propices à la survie des leptospires pathogènes. Adriana s’intéresse particulièrement aux communautés bactériennes présentes dans ce sol et cherche à identifier celles susceptibles de jouer un rôle dans la persistance des leptospires.
Mission au Parc des Grandes Fougères
Une seconde mission, sous la coordination d’Eva MEUNIER, s’est déroulée dans le cadre du projet RESILEPTO, un projet d’étude sur les réservoirs et inégalités dans la leptospirose en Nouvelle-Calédonie. Cette initiative a consisté en une rencontre avec la direction du Parc Provincial des Grandes Fougères. L’objectif était de présenter le projet RESILEPTO, ainsi que de solliciter la participation active du parc dans la collecte d’échantillons d’origine animale, un volet essentiel de cette étude.
Réunion de lancement RESILEPTO
Puis s’est tenue la réunion de lancement officielle du projet RESILEPTO avec l’ensemble de nos partenaires. Cette réunion a été couverte par la chaine NC La 1ère, qui a réalisé une série d’interviews. Une première diffusion est disponible ici.
Porteur du projet : Dr C. Cazorla (CHT), Dr F. Veyrrier (IPNC), Dr A.Loarec, Dr R. Thibault
Collaborateurs : D. Ukeiwe, M. Dupont-Rouzeyrol, Dr. J. Colot, Dr. Jouan
Partenaires : CHT (Services des urgences, de réanimation et de médecine interne), INRS, IPP, UCLA, Duke university
Dates : A partir d’avril 2025 ( Fin prévue en 2027)
NIHFI est un projet de recherche mené par l’Institut Pasteur Nouvelle-Calédonie, en collaboration avec le Centre Hospitalier Territoriale Gaston-Bourret à Dumbéa. Cette recherche a pour objectif de mieux comprendre les causes des maladies associées à la fièvre, en particulier, la leptospirose, due à la bactérie Leptospira afin de développer de meilleurs tests et traitements de ces maladies.
Financée par le NIH (National Institutes of Heath, Etats-Unis), l’étude est conduite en partenariat avec l ‘Institut Pasteur Paris et l’Institut National de Recherche Scientifique au Canada.
Pour cette étude, il sera nécessaire de recruter des adultes majeurs se rendant aux urgences du CHT pour une suspicion de leptospirose associée à une fièvre (> 38°C) ou pour une consultation en traumatologie et orthopédie et ne présentant pas de fièvre.
Des analyses seront faites pour comparer la réponse immunitaire de patients fébriles avec des patients, dits contrôles, ne présentant pas de signes d’infection. Ces prélèvements et les données proviennent de volontaires qui ont accepté de participer à la recherche.
Le recueil de sang et d’urine à différents moments, ainsi que le recueil de données médicales et sur les habitudes de vie seront aussi nécessaires au cours de cette étude.
Déroulement de l’étude :
Le recueil d’échantillons servira à faire des analyses sur les microbes (leptospirose ou autres) et sur la réponse immunitaire du patient. Il y aura des analyses génétiques, sur l’ADN du patient et sur l’ARN, copie de l’ADN qui permet le transport du message génétique et la synthèse des protéines. Ces analyses génétiques permettront de mieux comprendre comment les patients réagissent en cas d’infections et pourquoi certaines présentent des formes graves.
L’IPNC a une unité de recherche dédiée à l’étude de la leptospirose, particulièrement les mécanismes de survie des bactéries pathogènes dans l’environnement. En effet, la grande majorité des contaminations ne se font pas au contact des animaux mais au contact de sols souillés ou dans les eaux de baignade.
265 cas de leptospirose ont été recensés en 2022, dont quatre décès. Un record depuis 1997. Caractérisé par des fortes précipitations, le phénomène la Nina participe à la recrudescence de cette maladie ces trois dernières années et, fin avril 2023, il y avait déjà eu 114 cas. « Nous sommes sur la même dynamique », déplore Roman Thibeaux, responsable de l’unité de recherche et d’expertise Leptospirose à l’IPNC. Il précise néanmoins qu’une baisse du nombre d’infections pourrait être observée avec le passage en El Nino dans le courant de l’année. En effet, même si la leptospirose est une zoonose bactérienne, ce qui signifie qu’elle est partagée avec d’autres animaux, notamment des mammifères, ce n’est pas uniquement à leur contact qu’elle s’attrape. La majorité des cas calédoniens, « environ 90% d’entre eux », est liée à une exposition environnementale, favorisée par les fortes pluies. « Lorsque les gens ont des microlésions, qu’ils marchent pieds nus sur un sol contaminé par les urines de mammifères qui ont excrété des bactéries pathogènes ou dans les eaux de baignade. » Lors d’épisodes pluvieux intenses, qui lessivent les sols, les eaux de ruissellement se chargent de leptospires pathogènes, chavirent vers les habitations, causant des inondations. « Les gens se retrouvent alors littéralement les pieds dans l’eau avec un risque d’exposition très important. »
Un virage dans l’axe des recherches « Endémique à la ceinture tropicale, la leptospirose est particulièrement présente en Nouvelle-Calédonie. L’unité tire parti de cette l’implantation en zone de de forte endémie pour étudier cette maladie », précise Roman Thibeaux. Longtemps, il a été cru que la leptospirose s’attrapait principalement au contact des animaux (alors qu’ils sont directement impliqués dans moins de 10% des contaminations). « On savait déjà qu’il devait y avoir un lien entre l’environnement et la leptospirose puisqu’on observait quantitativement une augmentation des cas après des épisodes pluvieux, mais les mécanismes impliqués ne sont pas encore connus tous compris. » La leptospirose est un axe de recherche historique à l’IPNC. L’unité fait en revanche un virage dès 2016 et recentre ses travaux sur le rôle de l’environnement dans la transmission des leptospires pathogènes. Depuis trois ans, ce laboratoire a entrepris un projet d’envergure, nommé Spiral financé par l’agence national de la recherche pour comprendre les mécanismes de dispersion des leptospires et de leur survie dans l’environnement. Depuis 2021, l’unité travaille également avec les cliniciens du Centre hospitalier territorial (CHT) et du Centre hospitalier du Nord (CHN) pour étudier les modalités de traitement de cette infection, dans le cadre du projet LepjarNC. Ils étudient ainsi la réaction des malades de la leptospirose suite à la mise en place d’un traitement antibiotique et cherchent notamment à évaluer l’importance de la survenue de la réaction de Jarisch-Herxheimer, une réaction inflammatoire transitoire qui accompagne l’introduction des antibiotiques chez les patients. En parallèle de ces projets, des actions de coopération régionale avec Fidji et Vanuatu sont menées pour améliorer les capacités de diagnostic moléculaire et sérologique via des formations de responsables et techniciens de laboratoire en partenariat avec l’OMS et la CPS.
Dans le cadre du projet Fonds Pacifique OH-Lepto, l’unité de recherche et d’expertise sur la leptospirose a animé en mai dernier une mission de formation théorique et pratique pour quatre techniciens du Vila Central Hospital sur les techniques de diagnostic moléculaire de la leptospirose.
En savoir + : le projet Spiral
Démontrer le lien entre pluies et leptospirose Depuis trois ans, durant la saison des pluies, Roman Thibeaux et son équipe travaillent conjointement avec l’IRD, la province Nord et le milieu associatif, à Touho. Lors d’épisodes de fortes précipitations, ils récupèrent des échantillons d’eau, grâce à un préleveur automatique, installé sur un site pilote, déjà instrumenté par l’IRD afin d’étudier l’hydrologie du bassin versant. L’objectif est de comprendre le lien entre les fortes pluies, la dynamique hydrologique du bassin versant et la présence des leptospires. Depuis décembre 2022, l’équipe est également présente sur un second site à la Foa suivi et équipé par la Davar. « C’est un bassin versant beaucoup plus grand, plus intégrateur et avec une dynamique hydrologique différente. Son suivi nous permettra de comparer les deux échelles et de mieux comprendre la remise en suspension des bactéries dans ces contextes différents. » Ce projet Spiral est financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR) et se terminera cette année. Les premières observations indiquent de très fortes remises en suspension des leptospires des sols dans les eaux vives lors de ces événements intenses alors, qu’avant les pluies, la charge pathogène dans le cours d’eau est très faible. Dans les jours qui suivent l’évènement pluvieux, même si la charge bactérienne diminue en même temps que le décrue, les bactéries restent en grand nombre et le risque est toujours présent. « Nous pouvons donc passer le message de prévention suivant : attendez deux à trois jours avant de vous baigner, après un épisode de fortes pluies. L’eau doit être claire. »
Comment les bactéries survivent-elles dans les sols ? Dans le cadre de ce projet, l’équipe de l’IPNC étudient également les mécanismes de survie des leptospires dans les sols. Il existe des mécanismes de persistance mis en place pour se protéger tel que le biofilm, cette sorte de « couverture de protection » qui permet aux leptospires de résister aux antibiotiques, à la salinité, aux UV et à la température. Il y a également le rôle des facteurs physico-chimiques et biologiques associés à la présence ou l’absence de leptospires. « L’étude est en cours et il semblerait que le rôle du microbiote du sol soit particulièrement important », précise Roman Thibeaux.
Dans le cadre du projet Fonds Pacifique OH-Lepto l’unité de recherche et d’expertise sur la leptospirose organise actuellement une mission de formation théorique et pratique de quatre techniciens du Vila Central Hospital sur les techniques de mise en œuvre du diagnostic moléculaire de la leptospirose.
Ce projet, également soutenu par la CPS et l’OMS, vise à renforcer les capacités des laboratoires et à promouvoir une approche « One Health » de la leptospirose ; ce qui consiste notamment à organiser des échanges de compétences entre scientifiques des secteurs de la santé humaine et de la santé animale. A l’issue de cette formation, le personnel du laboratoire du Vila Central Hospital aura la capacité d’effectuer des extractions d’ADN génomique à partir d’échantillons de patients et de réaliser des PCR en temps réel afin de renforcer leur système de surveillance de la leptospirose humaine.
Les chercheurs de l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie, en collaboration avec leurs collègues de l’Institut Agronomique néocalédonien IAC ont recherché des leptospires dans les roussettes, grandes chauves-souris frugivores.
Leurs travaux ont permis de montrer la présence de leptospires originaux, correspondant probablement à des espèces encore inconnues, dans près d’une roussette sur dix.
Leurs résultats incitent à la prudence lors de contacts avec ces animaux sauvages et viennent d’être publiés dans la revue Transboundary and Emerging Diseases.