La professeure Yasmine Belkaid est une chercheuse de renommée internationale dont les travaux portent principalement sur la relation entre les microbes et le système immunitaire. Le 29 mars 2023, elle a été nommée au poste de directrice générale de l’Institut Pasteur.
La professeure Yasmine Belkaid dirige actuellement le Centre d’immunologie humaine des National Institutes of Health (NIH), l’agence américaine chargée de la recherche médicale et biomédicale, ainsi que le programme Microbiome du National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID), au NIH (Bethesda, Maryland, États-Unis), dont elle est la fondatrice. Au sein du NIAID, elle a créé le département de l’immunité de l’hôte et du microbiome.
Elle succèdera au professeur Stewart Cole et prendra ses fonctions de directrice générale de l’Institut Pasteur le 1er janvier 2024. Elle deviendra la seconde femme à occuper ce poste et le 17e directeur général de l’Institut Pasteur depuis sa création par Louis Pasteur en 1887.
Les scientifiques du Centre national de référence des Escherichia coli, Shigella et Salmonella, à l’Institut Pasteur à Paris, membre du Pasteur Network, ont publié le 26 janvier dernier dans la revue Nature Communications. Depuis de nombreuses années, ils surveillent sur le plan national la bactérie Shigella, responsable de la shigellose, une maladie diarrhéique très contagieuse. Ils ont ainsi détecté l’apparition de souches de Shigella sonnei hautement résistantes aux antibiotiques. L’analyse des séquences du génome bactérien et les caractéristiques des cas, survenus préférentiellement chez des adultes de sexe masculin, suggèrent que ces souches, originaires d’Asie du Sud, se propagent notamment chez des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Ce constat devrait être pris en compte par les cliniciens et les laboratoires dans le cadre des consultations pour infections sexuellement transmissibles (IST), avec pratique d’un antibiogramme systématique en cas d’isolement d’une Shigella pour une meilleure prise en charge des patients infectés par ces souches hautement résistantes. A ce jour, cette souche n’a pas été détectée en Nouvelle-Calédonie.
Les carbapénèmes sont des antibiotiques d’usage strictement hospitalier, utilisés en dernier recours lors d’infections. Or, ils peuvent s’avérer inefficaces au contact d’enzymes appelées carbapénémases qui sont souvent associées à d’autres mécanismes de résistance, responsable de réelles impasses thérapeutiques. La diffusion de ces enzymes a déjà touché le monde entier et les Entérobactéries Productrices de Carbapénémases (EPC) figurent au premier rang de la liste de l’OMS des « agents pathogènes prioritaires » résistants aux antibiotiques.
Malheureusement, la Nouvelle-Calédonie n’est pas épargnée. Ces EPC diffusent progressivement sur le territoire et sont souvent la cause d’infections conduisant à des situations d’impasses thérapeutiques dramatiques. En Nouvelle-Calédonie, la majorité des carbapénémases trouvées sont de type IMP, qui sont très difficiles à détecter sur les milieux sélectifs de routine.
Dans l’étude portée par le Groupe de Bactériologie Médicale et Environnementale, une méthode basée sur la résistance à l’ertapénème, un des antibiotiques de la famille des carbapénèmes, a été proposée pour distinguer les EPC dans des échantillons à très forte charge bactérienne. Cette méthode a permis d’isoler 18 EPC à partir d’effluents hospitaliers, dont un type de carbapénémase (KPC) encore jamais détecté sur le territoire. Au-delà de l’aspect scientifique, les auteurs font la démonstration que cette technique peut être appliquée dans des contextes à ressources limitées.
Profil de résistance d’une Entérobactérie Productrice de Carbapénémases isolée dans le cadre de l’étude, avec un type de carbapénémase qui n’avait encore jamais été détecté en Nouvelle-Calédonie.
Enjeux et objectifs Plus d’un million de décès est attribuée chaque année à la résistance antimicrobienne. En effet, l’utilisation massive des antibiotiques a conduit à l’émergence de « superbugs » tel que le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM) difficile à traiter avec les molécules existantes. Cela encourage la découverte de nouveaux traitements antibiotiques efficaces contre les infections humaines graves et le sepsis associé lié à un important taux de mortalité. Les maladies inflammatoires à médiation immunitaire (IMIDs) représentent aussi un problème de santé mondial majeur avec une incidence de 5 à 7% dans les sociétés occidentales. Les cytokines sont des médiateurs inflammatoires essentiels au déclenchement de la réponse immunitaire de l’hôte durant l’infection et qui contrôlent aussi la réponse inflammatoire dans la pathogénèse des IMIDs. Le développement des molécules se focalise sur la régulation des cytokines inflammatoires ou sur l’inhibition des voies de signalisation des Janus kinases (JAKs)/signal transducer and activator of transcription proteins (STATs) ou Jakinibs approuvés pour traiter les IMIDs. Cependant, au regard des patients réfractaires au traitement ou les maladies opportunistes liées aux mécanismes immunosuppresseurs, la recherche de nouvelles de molécules bioactives se poursuit et se focalise sur de nouvelles molécules inhibant les voies de signalisation des cytokines ou des JAK-STAT. Les microalgues et bactéries marines produisent des molécules anti-inflammatoires à grande valeur ajoutée dans le domaine de la pharmacologie. Les bioprospections menées en Nouvelle-Calédonie a conduit à la caractérisation de microalgues et de bactéries marines produisant des molécules bioactives à des fins d’application dans les biotechnologies bleues. Nous avons émis l’hypothèse que de nouvelles substances naturelles marines (MNPs) seraient à découvrir à partir de la biodiversité marine de Nouvelle-Calédonie et nous caractériserons l’activité antibactérienne et immunomodulatrice de MNPs issues de microalgues et bactéries marines néo-calédoniennes et disponibles dans les collections de l’IFREMER / ADECAL Technopole et de la start-up privée BIOTECAL.
Perspectives Le projet ANR CHARM investiguera des bioactivités complémentaires afin d’identifier des molécules innovantes à proposer comme molécules plateformes auprès des industries pharmaceutiques dans le secteur des antibiotiques et immunomodulateurs. Les résultats seront utiles pour améliorer la chaine de valeur ajoutée dans le domaine des MNPs et des technologies bleues en Nouvelle-Calédonie. Ce projet répond donc au besoin de développement et d’exploitation durable des ressources biologiques marines et contribue à la Stratégie Nationale de Bioéconomie. Il contribue à la valorisation de la biodiversité des territoires ultra-marins en répondant au Livre Bleu Outre-Mer validé par le Ministère des Outre-Mer. Nous visons des applications à longs termes en industrie pharmaceutique par des partenariats avec le secteur privé.
Présentation de Malia LASALO, Prix de la Valorisation, Doctoriales 2022 Investigation du potentiel immunomodulateur de substances naturelles issues de micro-organismes marins de Nouvelle-Calédonie
Présentation de Céphas XUMA, Prix du Jury, Ma Thèse en 180 secondes (MT180) 2024 PRopriétés Antibiotiques de substances NAturelles issues de micro-organismes marins de Nouvelle-Calédonie contre des souches antibiorésistantes (acronyme : PRANA)
La Nouvelle-Calédonie est reconnue comme un des 36 hotspots mondiaux de biodiversité terrestre et marine. Avec près de 80 % d’endémisme végétale et plus de 3 200 espèces natives, le territoire néo-calédonien représente ainsi une source considérable de substances naturelles bioactives. Parmi cette flore endémique, l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie, en collaboration avec l’université de la Nouvelle-Calédonie (UNC) et l’Institut de recherche pour le développement (IRD), a montré que l’extrait de feuille d’une plante Annonaceae locale, Xylopia pancheri, possède une activité antibactérienne importante contre le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM). La résistance aux antibiotiques reste en effet une problématique mondiale de santé publique, étant à l’origine de plus de 1,2 millions de décès en 2019. Parmi les bactéries impliquées, l’émergence de souches de SARM a conduit au retrait de molécules du domaine pharmaceutique si bien que la recherche de nouveaux antibiotiques efficaces se poursuit.
Photographie prise par Daniel et Irène Létocart de Xylopia pancheri, issue du site de l’association Endemia : https://endemia.nc/flore/fiche1682
Pour consulter l’article complet : « Antimicrobial activity of Xylopia pancheri Baill. Leaf extract against susceptible and resistant Staphylococcus aureus. » https://doi.org/10.1002/ptr.7714.
Les extraits de plante d’une Lamiaceae, Coleus forsteri, en photographie ci-dessus, possède des activités anti-inflammatoires.
Les populations néo-calédoniennes ont aussi recours à l’usage de nombreuses plantes traditionnelles notamment dans le cadre familial comme médecines complémentaires et alternatives. Parmi ces plantes traditionnelles, l’IPNC, en collaboration avec l’UNC, l’IRD et l’université MacQuarie à Sydney, a démontré que les extraits de plante d’une Lamiaceae, Coleus forsteri (anciennement Plectranthus forsteri), possèdent des activités anti-inflammatoires sur des macrophages humains en inhibant différents médiateurs inflammatoires : les cytokines et l’acide quinolinique. La caractérisation chimique des extraits de cette plante a montré la présence de molécules diterpènes pouvant expliquer ces effets biologiques. Cette plante, aussi appelée Hmitre ou Arnica kanak, est traditionnellement utilisée pour traiter les symptômes grippaux. La confirmation biologique de son activité anti-inflammatoire au niveau cellulaire pourrait aider à mieux comprendre le mode d’action de cette plante traditionnelle.
Pour consulter l’article complet : « Anti-inflammatory activities of Coleus forsteri (formerly Plectranthus forsteri) extracts on human macrophages and chemical characterization » https://doi.org/10.3389/fphar.2022.1081310
Photographie de cellules activées, confirmant l’activité anti-inflammatoire au niveau cellulaire.
Face à la mondialisation, les aires de répartition des moustiques connus pour transmettre le virus de la dengue augmentent, ce qui souligne la nécessité de détecter rapidement les espèces vectrices introduites et de prévenir leur établissement dans de nouvelles zones.
Pour les identifier, des scientifiques du réseau des instituts Pasteur ont évalué l’utilisation d’une nouvelle méthode : la spectrométrie de masse de type « Matrix-Assisted Laser Desorption Ionization Time-Of-Flight Mass Spectrometry », dite MALDI-TOF MS.
Des moustiques prélevés sur le terrain, appartenant à 8 espèces et provenant de 6 pays du Pacifique, d’Asie et de Madagascar, ont été inclus dans cette étude réalisée par l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie, en collaboration avec l’Institut Pasteur du Cambodge, l’Institut Pasteur du Laos et l’Institut Pasteur de Madagascar.
Cette étude a montré que le MALDI-TOF MS, qui génère des spectres protéiques spécifiques à chaque espèce, est un outil prometteur. Il pourrait ainsi être utilisé pour une surveillance internationale des moustiques vecteurs d’arbovirus. Cette technique est apparue aussi efficace que la méthode du séquençage de l’ADN. En effet, dans la majeure partie des cas, une identification exacte de l’espèce a été obtenue pour les moustiques testés, même pour les espèces morphologiquement et phylogénétiquement proches.